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"Seulement de la fin du XXème siècle?" > Historique > Peintures

En deuxième lieu, sa musique fait de Joni Mitchell un précurseur : l'exigence innovante de la musicienne a défriché, dès le milieu des années 70, les sentiers du Jazz-Fusion et de la musique dite "World" (pour l'essentiel à l'époque, un mélange de rythmes africains et latinos). Métissage dans lequel d'autres, et pas des moindres s'engouffrèrent dans les années 80 avec le succès mérité que l'on sait : Paul Simon (avec notamment Graceland), Peter Gabriel (avec ses albums post-Genesis), ou encore Sting (à travers sa production solo postérieure à The Police).

Ainsi, issue des scènes Folk originelles où des Judy Collins, Buffy Sainte Marie, Joan Baez ou Laura Nyro s'étaient épanouies, Joni Mitchell a très tôt bousculé l'étiquetage, en déjouant les tentatives de classification, et en excellant sur des terrains où personne ne l'attendait.
Premier indice de cette rébellion à la norme et au formatage : là où d'aucun la considère comme simplement musicienne, elle brouille les cartes en se revendiquant peintre avant tout (et envers et contre tous, serait-on tenté d'ajouter).

Et là où on l'avait rangée un peu vite dans le tiroir du Folk Song "confessionnel" (ses premiers albums ayant prodigieusement dépoussiéré et oxygéné le genre, de Song to a Seagull (1968), à Blue (1971), Joni Mitchell imprime à sa musique, avec For the Roses (1972), un tournant estampillé "Rock", qui culminera avec la sortie en 1973 de Court & Spark.

En conclusion, la profession de foi contenue dans Cactus Tree (morceau qui clôture son tout premier opus, Song to a Seagull en 1968) et qui fait dire à Mitchell, sur le plan de l'amour, que ses nombreux amants perdent tous leur temps à l'attendre, elle qui entend bien rester "So busy

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

For the Roses
(1972)

being free" ("tellement occupée à rester libre"), concerne donc tout autant son art que sa vie privée, soulignant ainsi la cohérence absolue entre la ligne de conduite épousée par la femme, et la philosophie de l'artiste.
Car c'est bien le moteur de la liberté qui pousse Joni Mitchell à changer de braquet dès que ses noces avec le Rock n' Roll sont consommées, ce Rock sublimé par Court & Spark.

La Canadienne est déjà ailleurs au moment où la profession la sacre "Queen of Rock n' Roll" en 1974 après la sortie de Court & Spark (et son million d'exemplaires vendus aux seuls Etats-Unis). Le genre n'a déjà plus les faveurs de l'artiste, fascinée par la liberté que donnent les structures musicales du Jazz, et dont elle avait déjà coloré, par touches subtiles, certaines des compositions des disques de sa période supposée "Folk", comme autant de cailloux laissés comme indices sur ses intentions futures par un Petit Poucet aussi mélomane que facétieux (on pense notamment à la clarinette de For Free dans Ladies of The Canyon, 1970).
Rétrospectivement, il est aussi intéressant qu'émouvant de constater que c'est la terrible lucidité dont a fait preuve cette artiste sur les valeurs mondialement exportées par la société nord-américaine (où l'argent et le sexe constituent les principaux critères de référence, avec comme corollaires le paraître et une jeunesse éternelle prolongée à n'importe quel prix), qui l'a fait s'intéresser au Jazz, et l'a amenée à bifurquer vers cette discipline musicale. Dès la trentaine, elle l'estime seule capable (mis à part la peinture), de lui permettre de "vieillir avec grâce et dignité", le moment venu. Ce en opposition au Rock n’ Roll, qui ne tolère que le culte d'une jeunesse physique artificiellement entretenue à coups de bistouris.

 

Court & Spark
(1974)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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