J’appris plus tard que son tempérament l’avait très tôt intéressé au sort des indiens natifs, ceux à qui “l’Homme blanc avait volé leur terre“, comme le proclamait l’un de ses mentors spirituels, Orlando Villas Boas (membre d’une fratrie à qui le Brésil doit la création du Parc national du Haut-Xingu). Orlando, décédé en 2002, laissa un grand vide au firmament des étoiles du panthéon personnel de Silvestre.
Fort de ma rencontre avec lui à Brasilia, et de la connaissance et de la perception de sa personnalité qui s’ensuivirent, j’ajouterai que si Silvestre Gorgulho s’est autant penché sur le sort des Indiens du Brésil, ce n’est à mon avis pas seulement en vigueur des forces de l’esprit, pas seulement par fascination intellectuelle et pur intérêt ethnographique et documentaire, mais surtout parce qu’il a un cœur et une âme, me semble-t-il, grandes comme le Brésil. Cœur et âme qui parlent si bien pour lui, au détour des poésies qu’il publie.
Tout ce qu’il fit pour mon travail, les quelques moments que nous partageâmes à Brasilia durant mon exposition, après que j’eus le bonheur et l’honneur de faire sa connaissance, me confirmèrent que l’homme était poète, artiste, pudique, et aimait les artistes et les poètes.
Et aimant l’art et la poésie, je compris pourquoi il avait succombé aux charmes d’une ville qui avait été conçue, dans l’esprit de ses géniteurs et notamment dans celui de son architecte, comme un miracle de poésie minérale et d’art, dans ses formes comme dans ses symboles.
Ainsi, faut-il croire, les grands esprits se rencontrent : Dieu sait si celui de Silvestre et celui d’Oscar Niemeyer ont dû être proches, et durent se retrouver dans la symbiose et la correspondance entre les idées, les idéaux ; mais aussi, très probablement, se nourrirent-ils d’amitié, ô combien. “La vie est plus importante que l’architecture”, paroles du Maître architecte -et je doute que l'ami Silvestre l’ait jamais contredit.