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"Seulement de la fin du XXème siècle?" > Historique > Peintures

Certains artistes marquent leur temps. Mais très peu lui survivent, l'écrasante majorité d'entre eux accompagnant l'époque qui les a vu naître dans sa dilution puis son effacement définitif, lorsqu'elle cède la place à la suivante.

L'œuvre musicale et littéraire de Joni Mitchell, œuvre unique en tout point, appartient à cette minorité, et ainsi a échappé et échappera à l'oubli dans lequel aurait pu la faire tomber la fuite du temps. Mis à part la qualité de la musique, sur laquelle tout a été dit, y sont probablement pour quelque chose les aspects réputés "introspectifs" (et surtout pas "confessionnels", appellation contre laquelle Mitchell s'est toujours insurgée, arguant que n’ayant jamais rien eu à se faire pardonner, elle n'avait par conséquent jamais rien eu à confesser) du propos qui sous-tend nombre des écrits de cette spéléologue de l’âme.
Écrits qui allaient bien au-delà des épanchements d'une "Petite Sœur des Cœurs Meurtris" (catégorie dans laquelle il s'avéra facile de ranger Joni Mitchell, et facilité à laquelle cédèrent bien de ses contempteurs), car ils exprimaient avant tout la singularité d'une personnalité exceptionnelle, et un point de vue très personnel et surtout très clairvoyant sur les réalités de l'âme humaine.

Une œuvre dont le discours n'a donc rien perdu de son actualité, puisqu'il est intemporel dans ses préoccupations : celles que tout un chacun partage. Interrogations liées à la jeunesse qui se fane, à la vie qui s'enfuit et l'amour qui se dérobe. Aux renonciations qui ternissent la première en la privant de sa force, aux désillusions qui maltraitent la seconde en la vidant de son sens, aux compromissions qui corrompent le dernier en ne laissant au cœur que l'amertume de la déception, et la frustration

 

 

 

 

Song to a Seagull (1968)

de l'échec. Donc, préoccupations universelles qui sont celles de tout le monde, les vôtres, les miennes, qui furent celles de nos parents -et seront celles des descendants des enfants de tous ceux à qui la vie a donné une progéniture.

Cette œuvre ne s'est jamais cantonnée à un simple témoignage plus ou moins opportuniste sur l'air du temps, puisqu'elle ne s'est jamais souciée de s'attacher à l'instant. Ou très rarement, un pourcentage infime de textes constituant l'exception à cette règle. Comme Ethiopia (dans Dog Eat Dog en 1983), ou The Fiddle and the Drum (Clouds - 1969).

Impossible donc de rattacher l'œuvre de Joni Mitchell à des mouvements comme le "Folk Song" (auquel elle n'a jamais vraiment appartenu) et encore moins au "Protest Song" et à ses dénonciations du système sociétal et politique en vigueur, un genre qui fit les beaux jours (et parfois le fond de commerce) de nombre de contemporains de Joni Mitchell dans les années 60. De Bob Dylan dans une certaine mesure, à Joan Baez –cette dernière en ayant été la figure phare, et en étant restée depuis, à tort ou à raison, le symbole et l'égérie d'une certaine façon. Car l'adéquation avec l'époque eut pour effet de dater le discours de ce type de mouvement, le rendant quasiment inaudible pour les générations qui suivirent, tant son contenu leur parut rapidement obsolète.
La "Fille Téméraire de Don Juan" échappa résolument à ces pièges, non par posture ou politique éditoriale, mais par nature : cela ne l'intéressait pas, tout bonnement, son atavisme la poussant davantage à traquer sans relâche pour ensuite mieux les disséquer à la manière d'une anthropologue de la Psyché, les travers, les lâchetés mais aussi les flamboiements inhérents à la condition humaine.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Clouds
(1969)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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