Début 2016, Elton John sortit ce qui s’avère être à ce jour son dernier album de compositions originales co-écrites avec Bernie Taupin. À dessein, je ne compte pas The Lockdown Sessions de 2021 dans le listing des albums studio traditionnels d’Elton John, dans la mesure où le concept de ce disque, le contexte de son enregistrement et son résultat musical, tant au niveau des compositions que de la variété de leurs interprètes, classe cette parution à part dans le catalogue d’Elton John.
L’album Wonderful Crazy Night, avec sa pochette joyeuse, sa musique et son titre dynamiques et optimistes, était sorti le 5 février 2016. Pratiquement au même moment (à un mois près) que Blackstar, le disque-testament de David Bowie, paru le 8 janvier 2016, juste deux jours avant la mort de son auteur.
La synchronicité des deux événements m’interpella fortement à l’époque. Je fus très ébranlé par la symbolique de ce contraste tragique entre la "merveilleuse folle nuit" du disque d’Elton John, si lumineux et plein de vie, et la résonance funèbre et glacée de l’album de David Bowie, adieu définitif du "Maigre Duc Blanc". La cruauté de ce contraste jeta un coup de projecteur violent sur la brutalité et l'absurdité de l’existence -l'une de mes obsessions, et vieille compagne de route. Et cette violence rendit encore plus insupportable la fragilité de tous ces moments et souvenirs que l’on croit éternels et que le néant, du jour au lendemain et sans crier gare, pourtant engloutit.
Ce contraste, de surcroît, sonnait le glas de l’époque qui avait vu naître ces deux monstres sacrés de la scène Pop-Rock britannique, contemporains l’un de l’autre (même si leurs différences humaines et artistiques étaient radicales, et leur manque mutuel d’empathie de notoriété publique). C'est pourquoi ma propre histoire liée à Elton John -aussi insignifiante puisse-t-elle être à ses yeux-, me sembla soudainement s'effacer en pointillé sous les miens, avec le délitement de tous ces souvenirs extraordinaires que je devais à l’artiste anglais.