Nommée en 1980 aux Grammy Awards en tant que "Meilleure interprète féminine", "Meilleur album de l’année", "Meilleure nouvelle artiste", Jones remportera ce dernier titre et cette récompense suprême sans effort, ajoutant à ce palmarès prestigieux un trophée supplémentaire, celui de "Meilleure interprète de Jazz", attribué par la Presse US la même année.

Mais tout en criant au génie, cette même presse s’empresse de la comparer à Laura Nyro, puis la sacre "Nouvelle Joni Mitchell". Une presse toujours avide de catch féminin et prête à tout pour que ces dames se déchaînent sur le ring. Ces comparaisons qui ne sont pas raison finiront par lasser un tant soit peu la nouvelle venue. Le clash finira donc par se produire sur le terrain du Jazz, entre la jeune émoulue de Venice et l’aînée "Prairie Girl" Mitchell (qui vient alors de sortir Mingus)… Le Jazz, un champ musical revendiqué par Jones, où cette dernière déclarera tout de go au magazine "Rolling Stone" que Joni Mitchell n’a rien à y faire (un peu imprudemment tout de même, lorsqu’on mesure le chef-d’œuvre qu’a toujours été Mingus et le classique qu’il est devenu), en lui reprochant de ne pas avoir "les tripes" pour interpréter les standards de la discipline parce que trop polie, trop lisse, trop sage, et surtout parce que n’ayant jamais touché de près le côté “jazzy” de l’existence -comprendre la descente aux enfers dans les tripots de Los Angeles, dont la nouvelle venue était devenue l'un des piliers au temps de ses amours avec Tom Waits. Mitchell ne se laissera pas faire et ripostera par médias interposés. Ce qui n’empêchera pas ces deux merveilleuses artistes (qui n’ont jamais rien eu à voir musicalement, et dont la seule ressemblance se limite à une même blondeur, l’addiction à la clope et le port des bérets, magnifiée par la célèbre photographie du grand Norman Seeff sur la pochette du premier disque éponyme de Rickie Lee Jones…), d’enterrer définitivement la hache de guerre quelques années plus tard, unies dans un même combat contre la maltraitance que l’industrie du disque leur inflige à toutes deux : leur label commun (Geffen, en l'occurrence) tente de retirer le catalogue d’albums studio des rayons, pour y vendre à la place des compilations commerciales...