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Holly se prélasse dans des baignoires transformées en canapés aux couleurs pop, rêve devant les vitrines de Tiffany remplies de diamants -et surtout aux dollars qu’ils représentent-, prête à tout pour les obtenir en affichant une chasse décomplexée à l’homme riche, celui qui pourra enfin l'entretenir.

Ces deux déracinées parties à l’aventure et à l’assaut de la vie partagent autre chose encore. La précarité et les épreuves mais aussi les rencontres exaltantes que New York offre à Patti Smith n’éloignent pas son cœur de son cocon familial resté dans le New Jersey, et deux des compositions de Horses sont inspirées par ses sœurs Kimberly et Linda (Kimberly et Redondo Beach), qui témoignent de cet attachement et de sa profondeur. Holly Golightly, elle, n’en finit pas de s’étourdir de champagne et d’aventures auprès d’hommes à qui elle espère soutirer le confort financier qu’elle brigue, mais ne pense qu’à son jeune frère Fred, sa seule famille et ses véritables racines, parti du Texas parce qu’enrôlé par l’armée, et dont elle attend des nouvelles chaque jour avec anxiété.

Ce qui m’a le plus intéressé dans cette rencontre entre ces "Two drifters off to see the world / Deux vagabonds partis découvrir le monde" (Moon River, paroles de Johnny Mercer, musique de Henry Mancini dans Breakfast at Tiffany’s / Diamants sur canapé), c’est le décalage entre les deux époques distinctes où elles

évoluent, au cours desquelles toutes deux tentent d’échapper à leur destinée pour s’en fabriquer une autre. Et, bien sûr, le décalage physique total d’apparence et de posture entre les deux femmes, qui souligne encore un peu plus le gouffre qui sépare les deux époques.
En effet, que peut-il y avoir de plus éloigné de la merveilleuse romance de Moon River que le rugueux, âpre, onirique, existentiel et exaltant Free Money de Patti Smith?
Un monde. Celui qui sépare le début des Années 1960 de celui des Années 1970.
Un monde qui a changé radicalement, en moins de dix ans, et dont les valeurs se sont lézardées, voire parfois inversées.

À première vue, Holly Golightly/Hepburn est l’opposée de Patti Smith, aussi raffinée, séduisante, écervelée et sophistiquée que la poétesse américaine est cérébrale, brute de décoffrage, androgyne, austère et radicale. Mais à première vue seulement. Car seul change le vernis que l’époque passe sur les êtres. Dans les années soixante-dix, la vie s’est durcie, le Vietnam et ses désillusions sont passés par là, les jeunes "qui en veulent" se sont rebellés, la violence est devenue un passage obligé pour exprimer les revendications, les femmes ne comptent plus sur les hommes pour leur procurer de "l’argent facile" puisqu'elles se sont émancipées et sont déterminées, certaines d'entre elles même prêtes au coup de poing pour affirmer leur indépendance.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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