L’Enfer de Henri-Georges Clouzot (1964)
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pas sans évoquer les personnages masculins peints par Jacques Benoit) en pleine course-poursuite dans Brasilia en construction. Quant au bâtiment d’Orly sud, il ouvre le film Playtime de Jacques Tati (1967), et sert de pivot à l’intrigue de Vivre pour vivre, réalisé par Claude Lelouch la même année. Ce dernier exemple a fourni à Jacques Benoit l’une des rares citations littérales de sa série : Yves Montand et Annie Girardot se tiennent de part et d’autre de l’image, tandis qu’au centre apparaît l’évocation de l’infidélité scellant la fin de leur couple (une construction iconographique qui emprunte à l’art médiéval, clin d’oeil anachronique dans ce décor des années soixante). Cette œuvre en particulier met l’accent sur l’intérêt d'Henri Vicariot pour les nouveaux matériaux tels que l’acier inoxydable et l’aluminium anodisé, ainsi que pour la généralisation de l’éclairage au néon – un élément dont tire parti Jacques Benoit pour conférer à cette scène de rupture une ambiance glaciale.
Cette composante cinématographique permet également de mieux appréhender la palette pour le moins déroutante de l’artiste. Tel un chef opérateur à qui serait donné une totale liberté d’exécution, il prend possession des acteurs et des décors pour leur imposer ses propres cadrages, sa lumière, ses couleurs. L’on perçoit une logique sous-jacente dans cette explosion de teintes saturées, tels ces ciels rouges qui apparaissent à plusieurs reprises, ou la volonté de créer un fort contraste entre des vêtements d’aspect réaliste et la peau colorée des personnages. Consciemment ou non, Jacques Benoit renvoie ici aux expérimentations menées en 1964 par Henri-Georges Clouzot pour son chef-d’oeuvre inachevé L’enfer, qui comprend plusieurs scènes pour lesquelles les acteurs (dont Romi Schneider) furent littéralement peints de la tête aux pieds afin de rendre sur la pellicule la couleur recherchée.
Passionné d’architecture, Jacques Benoit n’en reste pas moins guidé par le cinéma.
Pierre-Yves Desaive - Novembre 2011